Éloge funèbre à ma femme de 30 ans

Il y a plus de 35 ans, on s’écrivait nos premières lettres d’amour. Ensuite, les emails et les textos sont passés par là et on a totalisé des milliers de messages d’amour. Ceci est la dernière lettre d’amour que je t’écris.

Tu auras été mon soleil durant plus de la moitié de la vie, et même si je compte bien devenir très vieux pour veiller sur nos enfants, tu auras été mon autre moitié pour au moins le tiers.

Pendant ce temps, tu auras été ma fierté, mon amour, mon amie et tant d’autres choses.

Ton premier départ il y a six ans a failli me détruire.

Mais tu ne cherchais qu’à exister, trouver ta voie, ton équilibre. Peut-être as-tu sous-estimé ce que notre relation apportait à ton équilibre.

Pendant ces dernières années noires, on a tous été obsédés par le désir de comprendre ce qui t’arrivait.

Tu ne pouvais pas nous expliquer ton enfer, car tu ne le comprenais pas non plus. Au-delà de ta propre détresse, je sais que tu souffrais plus encore que nous de la douleur que tu provoquais chez les autres.

Même s’il restera des incertitudes, je sais que c’est bien l’alcool qui t’a tué.

J’écris, puis je m’adresserai, à tes enfants, tes parents, ta sœur, le reste de ta famille et ceux qui t’ont aimé, car militante athée que tu étais, tu ne croyais ni à l’âme ni au ciel – et il n’y a que là, dans ces cœurs que tu vivras désormais et resteras jusqu’à ce qu’à leur tour, ils s’arrêtent de battre.